ARISTOTE

On qualifie généralement la philosophie d'Aristote de réaliste. Pour bien saisir la portée de ce jugement, il faut tenir compte de précisions comme celles-ci , de Gilbert Romeyer Dherbey, «On résume souvent par le mot de "réalisme" l'inspiration de la pensée d'Aristote, réalisme « naïf » ajoutent certains naïfs pour désigner une pensée parfaitement au fait de ses présupposés. Mais si le réalisme se définit comme visée du réel, il se trouve affecté d'une énorme ambiguïté puisque la réalité est ce que tente d'exprimer toute philosophie. Une inspiration philosophique va donc se caractériser par le lieu particulier où elle invente de situer ce réel énigmatique ; si Aristote ramène la philosophie du ciel sur la terre c'est parce que, refusant de voir ce réel dans un monde idéal séparé, il veut lire l'essence dans les choses de ce monde, les pragmata. Le recours ici fait, à travers la pensée d'Aristote, au sens ancien de pragma vise à revaloriser la notion de chose, à lui redonner l'ampleur qu'elle a perdue en se bornant à désigner de nos jours l'objet simplement inerte.» (Les choses mêmes, La pensée du réel chez Aristote. Dialectica, L'Âge D'Homme, Lausanne, 1983.)

"Pour mieux comprendre ce qui suit, définissons d'abord ce qu'est l'Ousia. L'Ousia, c'est l'être concret, singulier, le sujet qui reçoit tour à tour des attributs contraires, mais qui reste pareil sous le changement. Mais il arrive que le changement détruise la substance. Prenons, pour exemple, l'eau dans un vase. L'eau contenue dans un vase devient chaude ou froide ; mais elle peut aussi se vaporiser, en d'autres mots, disparaître et se transformer en air. En pareil cas, ce qui, après élimination des autres éléments, ou malgré le temps, reste sous le changement, ce n'est pas l'«Ousia» comme nous l'avons décrit jusqu'à présent, c'est un substrat (support stable) indéterminé et amorphe, qu'Aristote appelle sous le nom de «Matière».

L'école de Milet tient, du septième au huitième siècle, une place dominante sous la conduite de «physiciens» tels que Thalère, Anaximandre et Anaximène. Sans aucun doute, leurs idées sont encore semblables aux cosmogonies (théories expliquant la formation de l'univers et de certains objets célestes) d'inspiration mystique et poétique. Cependant, leurs idées constituent un premier effort en vue de rattacher la formation des événements du monde à des forces naturelles. C'est ainsi que Thalère propose l'eau comme élément initial, primitif, à partir duquel le monde a pris naissance. Les êtres terrestres flottent sur l'océan et s'en nourrissent. Quant aux astres, ils naviguent sur les eaux d'un monde supérieur. Anaximandre, lui, croit que les astres naissent du feu et qu'ils tournent autour de la Terre comme une roue. Pour Anaximène, la forme primordiale est l'air. En devenant solide, l'air donne naissance au cristallin, sorte de corps transparent qui sert de support invisible pour les astres. Il admet, entre autres, qu'il se produit entre la terre et le ciel de continuels échanges sous forme d'évaporation, de pluie, de grêle ou de neige. Viennent ensuite, d'autres naturistes tels que ces deux grands personnages : Empédocle d'Argentine et Démocrite d'Abdère. C'est avec Empédocle que prend naissance la théorie des quatre éléments. Quant aux atomistes, Démocrite et Leucippe, font preuve d'une pénétration déjà très logique des phénomènes de la nature. C'est ainsi que la mise en place des conditions s'achève.

C'est à partir de celles-ci qu'Aristote sera amené à jeter les fondements de sa physique. Aux yeux d'Aristote, c'est une évidence que les quatre éléments de la physique traditionnelle, terre, air, eau et feu, peuvent tous se transformer les uns dans les autres. Ils peuvent disparaître, périr, pour donner naissance à n'importe lequel des autres. C'est possible, car chacun d'eux est à chacun des autres, à un certain égard, son contraire. Pour avoir cette opposition des éléments envers chacun d'eux, Aristote complique la façon de concevoir des éléments traditionnels. Selon la tradition qui est née d'Empédocle, chacun des éléments correspondait à l'une des qualités sensibles fondamentales. L'opposition de la terre et de l'eau est comme celle du sec et de l'humide. L'air et le feu s'opposent comme le froid et le chaud. Pour Aristote, chaque élément réalise l'union de deux qualités fondamentales : le feu est à la fois chaud et sec. Tandis que l'air est chaud et humide. L'eau est humide et froide, la terre, sèche et froide. Entre n'importe lequel des éléments, il y a toujours au moins une contrariété, ce qui rend possible le passage direct de l'un à l'autre des éléments.

Pour sa part, Aristote ne croit pas aux atomes. Il admet cependant la possibilité d'une décomposition des substances en des éléments très petits. Mais ils ne représentent pas des constituants homogènes. Ce qui nous permet de prétendre que la détérioration procède de facteurs matériels et formels. Les atomistes envisageaient les simples combinaisons nucléaires. En réaction contre la chimie atomique, Aristote dut développer sa conception du «mixte». Tout corps qui n'est pas l'un des quatre éléments forme un composé. D'un côté abstrait, le «mixte» s'observe par l'unité qu'il compose à ses parties constituantes. Sinon, il n'y a pas de mélange, mais bien un «agrégat» comme pour les assemblages d'atomes.

En conclusion, Aristote croyait que tout était fait à partir des quatre éléments naturels. La matière était continue et n'était pas faite de vide."(Carrefour atomique : Vanessa Gagnon et M.-E. D)

Aristote "démontre" que le vide n'est pas en montrant que dans le vide en lui-même on ne peut arriver à déterminer aucune détermination positive, ni haut, ni bas, ni la vitesse d'un mobile qui le parcourrait. L'infini n'est donc pas placé en-dehors de la réalité, mais s'installe au sein même de la réalité sensible, comme principe de changement, de corruption, et de mort. A l'argument de ses adversaires que le mouvement est impossible sans le vide, Aristote répond par une sorte d'argument ad hominem que c'est justement dans le vide que le mouvement est impossible, liant ainsi le plein à l'existence du mouvement.