EVALUATION FINALE

Archimède, par Domenico Fetti, 1620, Musée Alte Meister, Dresde (Allemagne).

Portrait d'un autre mathématicien, physicien grec : Archimède

1°) Pour commencer : a) Une vidéo à voir (Frédéric Back « Eurêka ! » En prenant son bain, Archimède découvre la loi sur l'immersion des corps. Crédit : Radio-Canada, noir et blanc, 1958, 00:26 )

b) Une biographie à lire

Archimède de Syracuse est un grand scientifique Grec de Sicile (Grande Grèce) de l'Antiquité, physicien, mathématicien et ingénieur. La vie d'Archimède est peu connue. Les informations le concernant proviennent principalement de Polybe (202 av. J.-C. - 126 av. J.-C.), Plutarque (46 - 125), Tite-Live (59 av. J.-C. – 17 ap. J.-C.) ou bien encore pour le cas de l'anecdote de la baignoire, de Vitruve, un célèbre architecte romain. Ces écrits sont donc, sauf pour Polybe, très postérieurs à la vie d'Archimède. Concernant les mathématiques, on a trace d'un certain nombre de publications, travaux et correspondances. Il a en revanche jugé inutile de consigner par écrit ses travaux d'ingénieur qui ne nous sont connus que par des tiers. Archimède serait né à Syracuse en 287 av. J.-C. Son père serait un astronome Phidias, fils d'Acupater, qui aurait commencé son instruction. Il fut le contemporain d'Eratosthène. On suppose qu'il parachève ses études à la très célèbre école d'Alexandrie. Du moins, on est sûr qu'il en connaissait des professeurs puisqu'on a retrouvé des lettres qu'il aurait échangées avec eux. Proche de Hiéron II, roi de Syracuse, , il entre à son service en qualité d'ingénieur et participe à la défense de la ville lors de la seconde guerre punique. Il est tué lors de la prise de Syracuse par le Romain Marcellus. Ce sont surtout ses découvertes en mécanique qui déterminent sa grande célébrité. Dans son livre De l'équilibre des plans il donne une théorie du levier. En physique, Archimède est le fondateur de la statique du solide, avec sa règle de la composition des forces et sa théorie du centre de gravité. Il crée l'hydrostatique dont il établit les lois de base dans son Traité des corps flottants.

c) Archimède, mathématicien et physicien, deux adresses à consulter: 1 et 2

2°) Pour continuer : deux extraits à traduire (Plutarque, Oeuvres morales - Qu’il n’est pas même possible de vivre agréablement selon la doctrine d’Épicure, ch. 11 ; Vies parallèles des hommes illustres - Vie de Marcellus, 17)

 

α) Ἀρχιμήδην δὲ βίᾳ τῶν διαγραμμάτων ἀποσπῶντες ὑπήλειφον οἱ θεράποντες· ὁ δ´ ἐπὶ τῆς κοιλίας ἔγραφε τὰ σχήματα τῇ στλεγγίδι, καὶ λουόμενος ὥς φασιν ἐκ τῆς ὑπερχύσεως ἐννοήσας τὴν τοῦ στεφάνου μέτρησιν οἷον ἔκ τινος κατοχῆς ἢ ἐπιπνοίας ἐξήλατο βοῶν ’εὕρηκα‘, καὶ τοῦτο πολλάκις φθεγγόμενος ἐβάδιζεν.

β) Οὔκουν οὐδ' ἀπιστῆσαι τοῖς περὶ αὐτοῦ λεγομένοις ἐστίν, ὡς ὑπ' οἰκείας δή τινος καὶ συνοίκου θελγόμενος ἀεὶ σειρῆνος, ἐλέληστο καὶ σίτου, καὶ θεραπείαν σώματος ἐξέλειπε, βίᾳ δὲ πολλάκις ἑλκόμενος ἐπ' ἄλειμμα καὶ λουτρόν, ἐν ταῖς ἐσχάραις ἔγραφε σχήματα τῶν γεωμετρικῶν, καὶ τοῦ σώματος ἀληλιμμένου διῆγε τῷ δακτύλῳ γραμμάς, ὑφ' ἡδονῆς μεγάλης κάτοχος ὢν καὶ μουσόληπτος ἀληθῶς.

 

 

3°) Pour prolonger : une découverte à étudier !

Deux traités du savant grec recouverts par un moine au XIIè siècle.

ARCHIMÈDE SE CACHAIT SOUS LA BIBLE.

"Elle a la peau ridée par les siècles, usée jusqu'aux dernières fibres à force de manipulations, mitée par les micro-organismes et tatouée par les moisissures. Elle aurait pu brûler dans des incendies de bibliothèque, se perdre entre Constantinople, le monastère de Mar Saba et Jérusalem, où elle a séjourné, finir en cocotte en papier et se volatiliser des milliers de fois. Les historiens ne savent d'ailleurs rien de sa vie entre le XIIè et le XXè siècle. Elle a totalement disparu. Mais, depuis 1998, contre 2 millions de dollars versés à Christie's, cette copie retrouvée du Xè siècle des deux plus importants traités d'Archimède appartient à un collectionneur anonyme. Et, depuis le mois de mai, elle continue sa vie sous les lumières indiscrètes de deux équipes de physiciens américains.

Car pour avoir survécu aussi longtemps, pour avoir échappé aux pillages et été si précieusement gardée, la copie du Traité des corps flottants et de la Méthode des théorèmes mécaniques d'Archimède a un secret. Elle s'est cachée sous les traits d'un ouvrage. Une bible écrite au XIIè siècle par un moine orthodoxe. "C'est sans doute ce qui l'a sauvée, raconte Roger Easton, physicien au centre d'imagerie électronique du Rochester Institute of Technology (RIT), à New York. Le moine copiste devait manquer de support pour écrire et comme, à l'époque, la religion était plus importante que la physique, il a effacé le traité écrit deux siècles auparavant, gratté l'encre, et réutilisé les pages." Le manuscrit du Xè siècle effacé est ainsi devenu un palimpseste, un texte disparu pour laisser la place à un autre . C'est le professeur danois Johan Heiberg qui l'a repéré le premier en 1907 dans une bibliothèque de Constantinople. D'abord à l'œil nu. En lisant cette bible, l'écriture grecque a dû lui sembler parasitée par d'autres caractères. Alors le philosophe a retourné le livre de 90 degrés et prit sa loupe. Et sous le texte sacré, il en a découvert un autre, rédigé dans la même langue, à peine perceptible mais bien réel. "Le disciple d'Archimède avait utilisé les meilleurs matériaux de l'époque", se réjouit Roger Easton. Des peaux tannées de brebis, de vache et de chèvre empreintes d'une encre métallo-tannique indélébile. Le même support a d'ailleurs été employé en 1776 aux États-Unis pour éditer la Déclaration d'indépendance et le gouvernement allemand aurait utilisé des encres du même type jusqu'en 1974 pour tous ses documents officiels.

Ligne après ligne, Heiberg a donc pu retrouver les restes d'encre, reconnaître le style d'Archimède et entamer le déchiffrage de la seule copie connue à ce jour de la Méthode des théorèmes mécaniques. Un travail de titan qui a laissé de nombreuses zones d'ombres dans les 174 feuilles de parchemin. Les chercheurs du RIT et de l'université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland, États-Unis) tentent maintenant d'aller plus loin. Mais près d'un siècle après l'analyse d'Heiberg, l'état du palimpseste s'est encore dégradé et sa lecture est encore plus difficile. Méfiante, Kirsten Lavin, la galeriste responsable de l'œuvre, ne leur a accordé que cinq pages. De quoi tester leur soin et l'efficacité de leurs instruments avant d'aller plus loin. Chaque équipe a pu approcher les mêmes documents pour les soumettre à ses propres techniques d'investigations. "Nous ne touchons presque jamais aux pages, précise Roger Easton. Nous avons accès au document original, et c'est exceptionnel, mais nous le manipulons seulement le temps d'obtenir les images dont nous avons besoin."

Et pour qu'elles soient nettes, qu'elles restituent la réalité le plus fidèlement possible et révèlent tous les caractères qui ont marqué la peau tannée, les scientifiques ont troqué la loupe du scientifique danois contre l'imposant arsenal de la physique. Piochant dans les techniques d'imagerie médicale comme dans les systèmes géographiques utilisés par l'armée pour détecter les mines antipersonnel par satellite ou par les géologues pour déterminer la nature d'un sol et ses différentes strates. Ils ont appelé en renfort des caméras numériques à large sceptre de couleurs pour séparer les deux jeux d'écritures, des caméras infrarouges pour distinguer les textes sur le papier noirci par endroit, les rayons ultraviolets pour rendre la littérature d'Archimède brillante et fluorescente, la tomographie par émission de positons pour augmenter le contraste entre le parchemin et l'encre. En revanche, il n'est pas question de pratiquer des radiographies aux rayons X, "tellement énergétiques qu'ils passent à travers le palimpseste sans rien voir". Toutes les données sont transmises à un ordinateur pour analyse. "La composition chimique des deux encres est très similaire, explique le physicien du RIT, les deux textes apparaissent alors à l'écran et l'ordinateur nous indique ce qui appartient au premier ou au second." Reste ensuite à reconstituer le puzzle. Un long travail confié à l'historien et non au physicien. Il lui faut remettre les pages dans l'ordre, les traduire et les interpréter. "Même la technique la plus parfaite ne pourra pas faire réapparaître certains fragments du texte qui ont été détruits, regrette Reviel Netz, historien des sciences et spécialiste de la Grèce ancienne à l'université de Stanford (Californie). Les images numériques me permettent de deviner certains caractères, mais d'autres m'échappent. C'est encore très expérimental." Malgré tout, le texte d'Archimède est apparu aux chercheurs à partir de cinq feuilles volantes. Dans sa quasi-totalité et malgré la très mauvaise conservation de certaines pages. Et là, surprise! "Nous avons découvert une page qui n'avait pas été repérée par Heiberg en 1907", s'enthousiasme t-il .Trop difficile à discerner avec les moyens de l'époque. Le scientifique danois n'avait pas remarqué qu'un des feuillets de la bible protégeait quelques autres lignes du Traité des corps flottants. Quelques paragraphes qui n'ont donc encore jamais été reproduits, ni traduits, ni étudiés.

Mais Reviel Netz a déjà récupéré le texte et le regarde de près. "Jusqu'à présent, je travaillais à partir des traductions de Heiberg", explique l'historien. Incomplètes, car certaines lignes se trouvaient dans le pli de la reliure du livre de prières, et parfois mal interprétées. Par exemple, le chercheur danois avait interverti le recto et le verso de la 81è feuille. "Grâce aux techniques d'imagerie numérique, nous avons maintenant accès directement aux mots d'Archimède. Pas à un ersatz." Mathématiquement et scientifiquement, la lecture des dix pages redécouvertes ne devait pas bouleverser notre perception des principes de physique et des lois déjà déchiffrés par Heiberg. Mais elle devrait lever un peu plus le voile sur la manière de raisonner du savant grec. "Si l'on demande ce qui se passe dans l'esprit d'un scientifique, écrivait Reviel Netz en juin dans une revue américaine, nous devons examiner tous les indices disponibles. Ses plus petits gribouillis peuvent nous renseigner sur ses pensées." Bien que reproduits par son disciple, les griffonnages d'Archimède n'ont jamais attiré l'attention d'Heiberg. Dans ses traductions, "il n'a pas reproduit les diagrammes et les schémas représentés dans le palimpseste par exemple, raconte Reviel Netz. Cela ne l'intéressait pas". Il les croyait faux, approximatifs et sans importance. Et avait choisi de les ignorer. Les historiens des sciences n'ont donc jamais pu se pencher dessus. Mais grâce aux jeux de lumières des chercheurs du RIT et de l'université Johns Hopkins, ces éléments sont remontés à la surface. Des figures géométriques sont alors apparues dans les textes. Elles ont un peu changé "l'image que nous avions d'Archimède. Il m'apparaît maintenant qu'il portait un très grand intérêt aux détails".

Car si, deux cents ans avant Jésus-Christ, le philosophe avait cru bon d'insérer des croquis, des annotations, des abréviations dans ses traités, ce n'était pas seulement pour rendre le texte plus agréable. Ils lui servaient à ses démonstrations mêmes. Par exemple pour visualiser des intersections. Et surtout à appliquer ses réflexions mathématiques à la physique. "Les croquis nous apprennent que les figures géométriques sont une invention des mathématiciens grecs, que, dès cette époque, elles servaient à élaborer la pensée mathématique", analyse l'historien américain. Autre constatation importante: la Méthode des théorèmes mécaniques n'a pas été conçue comme un recueil de leçons, une succession de chapitres très différenciés les uns des autres, comme Heiberg le suggérait et les a édités. Ils constituaient un tout, un discours sans rupture. "Et ceci change beaucoup notre compréhension de ce qu'il contient, continue t'il. Ce texte n'est pas une compilation de résultats, il est à lire comme une lettre cohérente, un document dans lequel Archimède nous dit : "Voilà ma méthode"." Vingt-deux siècles plus tard, on disposera peut-être d'une traduction quasi complète : les résultats obtenus sur les cinq premiers feuillets ont séduit Kirsten Lavin. Elle a donné son accord pour que les 169 qui restent soient soumis cette année aux rais des lumières indiscrètes. Julie Lasterade (Journal Libération 09/01/01)

1°) Qu'est-ce qu'un palimpseste ? En quoi cet exemple est-il tout particulièrement surprenant et passionnant ?

2°) Pourquoi cette découverte peut-elle paraître majeure ?

3°) En vous appuyant sur les textes étudiés précédemment, sur les anecdotes rapportées par Plutarque au sujet d'Archimède que vous avez traduites, sur le document fourni à propos du palimpseste analysé, sur le tableau de Domenico Fetti reproduit plus haut, vous rédigerez une synthèse sur la méthode scientifique antique et sur son apport dans la construction de notre savoir.