Objectifs □ scène de vase n°I □ n°II □ n°III □ n°IV □ n°V □ n°VI □ n°VII □ n°VIII Déclinaisons Conjugaisons

VASES PEINTS GRECS □ Lire les mythes héroïques □ Flexion nominale et désinences verbales

□□□□ ὁ Ἀχιλλεὺς καὶ ὁ Πάτροκλος □□□□

Commentaire d'oeuvre d'art : une scène de vase antique

Cette scène se trouve sur le fond (médaillon) d’une coupe à boire, une kylix dont voici un exemple en guise de modèle.
On appelle céramique à figures rouges les vases antiques dont les dessins ne sont pas couverts de vernis ; ne s’oxydant pas à la cuisson, ils ne noircissent pas mais restent de la couleur de la terre cuite, d’une couleur plus ou moins jaune orangé/rouge.
L’épisode représenté relève du mythe de la guerre de Troie (racontée dans l’Iliade d’Homère) et illustre les liens très forts du grand guerrier grec Achille pour son protégé Patrocle qu’il aime entre tous.
On est sûr de l’identification des héros grâce aux inscriptions sur la partie supérieure du médaillon ΑΧΙΛΛΕΥΣ (15) et ΠΑΤΡΟΚΛΗΣ (16).
Achille, à droite, est coiffé d’un casque (κράνος) surmonté par un cimier en crins de cheval (1), les parties latérales de son casque (garde-joues) sont relevées (2).  La cuirasse (θώραξ) comporte des épaulettes (3) et remonte haut dans le dos pour protéger la nuque. Ces guerriers sont des hoplites (ὁπλίτης de ὅπλον « arme »), c'est-à-dire des fantassins lourdement armés, bien qu'ils ne portent ici ni lance, ni jambières ni épées visibles..
Le regard attentif du héros (4) se porte sur les soins qu’il prodigue à son compagnon d’armes blessé par une flèche, arme que l’on distingue sur la gauche de la scène (9). Le bandage est minutieux, comme en témoigne le travail des mains d’Achille (5); il est dessiné à la peinture blanche et au tracé rouge et se trouve en position centrale du médaillon (6).
Patrocle porte l’armure, c’est une blessure de guerre ; il est assis sur la face externe de son bouclier rond (ἀσπίς) dont on distingue une partie du motif décoratif en noir (12). Il porte encore son carquois dans le dos (13). Patrocle est coiffé non pas d’un casque mais d’un pilos (πῖλος), un chapeau de cuir (7). Pour ne pas montrer sa douleur, il détourne la tête (8), le regard dans le vide. Il porte barbe et moustache (8) contrairement à Achille : est-il moins jeune que lui ? Patrocle s’en remet entièrement  à Achille, il a le pied gauche appuyé sur le bord du médaillon (10), les cuisses ouvertes, ce qui laisse voir son sexe dessiné avec grande précision (11), dans une intention érotique probable, compte tenu des relations amoureuses entretenues par les deux hommes d’après les écrits grecs postérieurs au poète Homère.
Le dessin est d'une remarquable finesse et sûreté de traits avec une extrême précision dans les détails: sandales à lacets d’Achille, cuirasses…
On note la frise décorative de trois palmettes au bas du médaillon (14) pour meubler agréablement l’espace laissé vide, comme il est d’usage.


Cet épisode n’est pas mentionné dans les écrits d’Homère. Pindare dans ses Olympiques (IX, 70-79) mentionne Patrocle qui accompagne Achille lorsque ce dernier ravage la plaine de Teuthras, en Mysie. Ce vase célèbre illustre peut-être ce point précis mais c’est sans certitude.
Il s'agit en tout cas d'une scène de grande qualité illustrant les liens unissant les compagnons d'armes, héros couverts d’exploits guerriers qui s'entraident dans l'épreuve...